Inauguration de la gare-passerelle de Mons, après 9 ans de retard
Après près de vingt ans de chantier et neuf ans de retard, la nouvelle gare de Mons, conçue par l’architecte espagnol Santiago Calatrava, a été officiellement inaugurée ce vendredi 31 janvier. Initialement budgété à 37 millions d’euros, le projet a vu ses coûts grimper jusqu’à 480 millions d’euros, suscitant de nombreuses critiques. Si des personnalités comme Sophie Dutordoir, CEO de la SNCB, et l’architecte lui-même étaient présentes, l’ex-ministre de la Mobilité Georges Gilkinet a boycotté l’événement, dénonçant une « dépense publique inconsidérée ». Avant cette inauguration officielle, la gare avait déjà accueilli ses premiers voyageurs dès le 18 décembre, après une présentation presse. Son ouverture coïncide avec le lancement du festival Mons en Lumières, qui débute à la gare avec l’œuvre Horizons.
« Rome ne s’est pas faite en un jour : la Muraille de Chine, un millier d’années, la Tour de Pise, 200 ans, la Sagrada Familia, 140 ans et ce n’est pas encore terminé. À Mons, le chantier de la gare se sera étalé sur près de 20 ans, nous a également rendu très célèbres jusqu’au-delà de nos frontières, mais aujourd’hui, nous y sommes et la voilà », déclare Sophie Dutordoir, CEO de la SNCB, lors de l’inauguration le vendredi 31 janvier du nouveau bâtiment de la gare de Mons.
Officieusement, le grand bâtiment cathédral avait déjà profité d’une présentation presse le 16 décembre pour une ouverture deux jours plus tard aux navetteurs de la SNCB. Le 31 janvier a commencé le festival « Mons en Lumières », dont le parcours débute à la gare avec l’œuvre « Horizons ».
De nombreux politiciens ainsi que Santiago Calatrava (qui signe en Belgique la fin de la réalisation de son deuxième bâtiment, après la gare de Liège-Guillemins) ont fait le déplacement à l’évènement.
Contrairement à Georges Gilkinet, désormais ex-ministre de la Mobilité depuis ce lundi, qui a annoncé ne pas venir. « J’ai en effet décidé de ne pas associer mes quatre années au service du train à ce qui constitue l'une des pires dépenses publiques inconsidérées des deux dernières décennies. Quoi qu’on pense des qualités architecturales de l’œuvre, cette gare est le symbole exactement inverse de la politique que j’ai menée pendant quatre ans en matière ferroviaire : le symbole d’un passé peu glorieux, caractérisé par des choix de prestige, des dépenses inutiles et des petits arrangements entre amis, plutôt qu’au service du public et d’une mobilité plus verte. (…)
Les décisions prises au cours des législatures passées depuis le point de départ de ce projet, en avril 2004, ont conduit à une facture finale absolument scandaleuse, au détriment des finances publiques, au détriment du service ferroviaire mais aussi de l’accessibilité d’autres gares dans la région. Et donc, avant tout, au préjudice de chacun des citoyens. Quand on investit plus de 480 millions à Mons, ce sont autant de moyens qui ne sont pas disponibles ailleurs, là où c’est pourtant urgemment nécessaire, comme à Tournai ou Leuze, pour ne citer que deux exemples hainuyers. »
Retard considérable
« Le projet aura fait énormément parler de lui, qui aura animé nombre de débats politiques et le fera sans doute encore car il aura marqué l’histoire de la SNCB. » Le projet de nouvelle gare a été débuté en 2004, et depuis lors, « tant d’eau de mer ont coulé sous les ponts ». Il aura mobilisé plus de vingt entrepreneurs et en moyenne pas moins de 120 personnes chaque jour sur le chantier en 2024.
« Il y a 20 ans, le contexte était bien différent, la vision et autres priorités prévalaient sur le renouveau de gares avec Gand et Malines en Flandre et Liège et Mons en Wallonie. »
Initialement, en 2006, le budget pour une gare passerelle (entre le centre et les Grands-Prés) était de 37 millions d’euros pour un aménagement général du site de la gare, sans inclure l’infrastructure ferroviaire ni le réaménagement de l’ancien bâtiment voyageurs et une ouverture début 2015. C’est la raison pour laquelle le choix s’était porté sur le projet de Santiago Calatrava, mais progressivement le projet prend une toute nouvelle envergure et de nombreuses modifications entraînant la destruction de l’ancien bâtiment voyageurs, ce qui fait progresser le budget total à 150 puis 263, 324, 332 et enfin 480 millions d’euros, pour tout un nouveau projet de gare-passerelle.
Cette explosion des coûts s’explique aussi par la faillite d’une entreprise impliquée dans le chantier, qui a entraîné de nombreux retards et surcoûts pour reprendre les travaux avec de nombreux appels d’offres qui ont relancés. D’autres divers problèmes comme le manque de coordination entre les différents acteurs ont également été relevés pour ce retard.
Une gare multimodale et moderne
Concrètement, la nouvelle gare de Mons comporte une grande passerelle couverte (de 165 mètres de long et 15 mètres de large), composée d’acier et de béton, entre la place Léopold et la place des Congrès, et relie ainsi le centre historique de Mons avec le quartier des Grands-Prés. Elle y abrite quatorze commerces, ainsi que des services tels que des consignes à bagages, un guichet TEC, un point CASH et un centre de prélèvements médicaux (antenne du CHR de Mons). On peut également noter l’arrivée d’un Travel Store dans le même design qu’à Bruxelles-Midi par exemple et des toilettes flambant neuves signées 2theloo.
Plus de 190 trains de la SNCB parcourent la gare chaque jour pour 57 000 voyageurs chaque jour. De plus, depuis le 19 décembre dernier, la gare est redevenue internationale avec le lancement des trains Ouigo (3 fois par jour) entre Bruxelles et Paris via Mons, Aulnoye-Aymeries et Creil. La nouvelle liaison à bas prix s’avère être un fort succès, avec pas moins de 150 000 billets en presque deux mois de disponibilité.
Le OUIGO Bruxelles - Paris sera lancé le 19 décembre prochain
Selon des recherches Mobilithib, le OUIGO (EuroCity) Bruxelles-Midi - Paris-Nord, opéré par la SNCB et la SNCF trois fois par jour, sera lancé officiellement le 19 décembre prochain. De manière confirmée, il s’arrêtera aussi à Mons, Aulnoye-Aymeries et Creil.
Malgré ses défis architecturaux, la gare a été construite selon les critères de la SNCB pour permettre aux personnes à mobilité réduite une accessibilité en autonomie et une interconnexion aisée avec les autres moyens de transport : pourvue de 5 quais couverts, dont un quai dédié aux bus, taxis et déposes minutes et un quai mixte bus et trains. La gare des bus est intégrée à la gare ferroviaire.
La passerelle et les quais sont accessibles en toute autonomie grâce, entre autres, à 12 ascenseurs (dont 2 ascenseurs au niveau du parking Congrès et 2 ascenseurs par quai), des quais rehaussés à 76 cm et des chemins podotactiles pour les personnes malvoyantes et aveugles.
Pour les cyclistes, il y aura 350 emplacements. Cependant, certains usagers sont inquiets. En effet, avec l’ouverture du nouveau bâtiment de Calatrava, l’ancienne structure temporaire va être enlevée, qui se trouve être plus adaptée aux cyclistes, que le nouveau bâtiment qui est considéré comme peu accessible.
Côté routier, la gare comporte deux parkings voitures avec un total de 862 emplacements, dont 20 places pour les personnes à mobilité réduite. Le parking côté ville sera mis en service ultérieurement. La gare accueille également 350 emplacements pour vélos.
D’autres projets moins chers pour éviter le trou financier
La stratégie de la SNCB a aujourd’hui fondamentalement changé, selon la société. Depuis 2018, la SNCB développe un nouveau concept de bâtiments de gare qui se caractérise par sa modularité, ce qui permet de l’appliquer pour l’ensemble des gares mais également d’adapter les équipements à l’évolution des besoins au fil des ans. Aujourd’hui, les gares de la SNCB connaissent une standardisation progressive de leurs équipements (abris de quais, bancs, râteliers vélos, signalétique…), évoluant ainsi vers des gares fonctionnelles, confortables, durables, accessibles et connectées aux autres transports en commun.
Les nouvelles gares de la SNCB sont également durables avec l’ambition de « quasi zéro énergie » : elles sont équipées de panneaux solaires, de systèmes de récupération des eaux de pluie pour l‘entretien et les sanitaires, de poubelles de tri sélectif et d’éclairage LED.
La SNCB s’assure également aujourd’hui du meilleur rapport qualité-prix, en privilégiant la sobriété et l’efficacité dans ses choix, y compris en matière de maintenance et de consommation énergétique. La SNCB entend ainsi garantir, aujourd’hui et pour les années qui viennent, la cohérence de ses investissements en gares, tout en gardant le contrôle sur les dépenses et les délais. Depuis que le plan de transformation des gares de la SNCB a été lancé, 31 bâtiments ont déjà été rénovés ou reconstruits selon cette nouvelle approche. Des chantiers sont en cours sur 48 sites et encore 28 projets sont planifiés, ce qui portera le chiffre à 76 nouvelles gares d’ici fin 2032.
Une info, une idée ? Contactez-moi via Telegram, in@thibaultlapers.be ou mes réseaux sociaux :
Mobilithib : Bluesky.
Mes réseaux perso : Bluesky, Facebook.
L’info a un coût, si vous le souhaitez, vous pouvez contribuer à ce projet.